Derrière cet intrigant patronyme inspiré par la formule que Voltaire, « Ecrasons l’Infâme », utilisait en conclusion de ses lettres, se cache une formation qui affiche dès son premier titre, "Le Désespoir du Prophète", une furieuse envie d’en découdre avec nos pauvres esgourdes. Une évidence à vrai dire puisque le groupe comporte dans ses rangs cinq musiciens passés par SVART CROWN, NO RETURN, HYRGAL, DEMANDE A LA POUSSIERE, OPHE et JARELL. Des enfants de chœur, donc, qui ont choisi de mettre en commun leurs sombres aspirations pour balancer ici un black metal intense et grandiloquent.
Il ne faut d’ailleurs qu'une poignée de secondes pour le constater sur ce fameux "Le Désespoir du Prophète" qui ouvre ici les hostilités avec hargne. Un démarrage rageur sur lequel la machine, impitoyable, se met en marche en façonnant des montagnes russes rythmiques envoûtantes : impossible de résister au charme de ces embardées démoniaques. Voilà d’emblée un superbe morceau qui marie l'authenticité vengeresse du black traditionnel et l'élégance obscure propre à certains de ses compatriotes, GLACIATION en tête de liste.
La suite est du même acabit, "Tribunal de l’Âme", "La Danse des Crânes" et son final à l’accordéon charrient une vague de trémolos inquiétants que l’on retrouve un peu plus loin dans leur forme la plus brute avec "Le Royaume du Vide". Mais le groupe a bien compris aussi que le bastonnage ne fait pas tout et qu’en s’employant à prendre certains chemins de traverse, son black metal n’en est que plus effrayant. En témoignent ces noires déclamations illustrant le morceau "Missive" qui se mêlent à un tempo plus posé sur un texte sombre et intimiste. Plongeant ainsi plus loin dans son trip l’auditeur sans se soucier de respecter les codes bien établis du genre. Le reste touche en plein dans le mille, avec une mention spéciale pour le doublé "Ultime Projection"/"Valetaille", véritable tourbillon de sensations extrêmes. La lueur faiblarde et apaisée d’un "Feu Pâle" investit finalement l’espace restant pour conclure l’album dans un nuage de fumée âcre.
A l'image de cette pochette qui jongle entre le doré et le foncé, inspirée à n’en point douter par le « The Mandrake Project » de Bruce Dickinson (hu hu), cet album se révèle aussi bien dans les moments fougueux, appuyés par une exécution exemplaire de précision, que dans les parties plus nuancées où la section rythmique se joue des règles établies avec un doigté. Appuyé par un travail minutieux à la production signé Edgard Chevalier dans son antre du Lower Tones Place Studio, « Belluaires » constitue une bien belle carte de visite pour ce "jeune" groupe qui ne devrait pas en rester là...
