16 février 2024, 17:00

GRIFFON

Interview Sinaï et Aharon


Un nouvel album de GRIFFON est sorti ce 16 février et on peut constater qu’il est lourd de sens et de riffs black metal. Intitulé « De Republica », il met plus que jamais à l’honneur la puissance et l’atmosphère en conservant un côté solennel des plus percutants. Le guitariste Sinaï et le chanteur Aharon nous en disent un peu plus sur ces nouvelles compositions et leur concept.
 

Merci de répondre à quelques questions à propos de votre nouvel album « De Republica ». Il arrive quatre ans après son prédécesseur, on présume que vous étiez impatients de le voir sortir ?
Sinaï : Salut, surtout content d’avoir terminé le travail qui a été éprouvant.  Donc il s’agit plus d’un sentiment de soulagement. Maintenant il faut préparer la suite tranquillement.
Aharon : Je partage le sentiment de mon collègue... c'est un soulagement. Pour moi qui suis en charge de la communication et de la programmation, je reste toujours la tête dans le guidon, mais il est vrai qu’on commençait à voir le bout du tunnel. Après il n’y a plus qu’à assurer les concerts.

Sans parler d’engagement, on connaît GRIFFON pour ses albums historiques et ses textes documentés. Quel est le concept de « De Republica » cette fois ?
Aharon :
L’idée était pour cet album de continuer notre réflexion sur l’organisation des communautés humaines. Le premier album « Har Hakarmel », traitait de la question de la mort du paganisme supplanté par le monothéisme. Le second « O Theos, O Basileus », de la relation entre Dieu et le pouvoir. Le troisième avance encore d’un cran dans l’évolution des sociétés, en questionnant le poids du peuple face aux gouvernants. Pour résumer en une phrase, il faut bien comprendre qu’à partir du moment où l'on a fait sauter la légitimation du pouvoir par le spirituel, s’est imposé par la suite l’idée du "peuple" comme entité légitimante. Ce vecteur est beaucoup plus important et puissant que ne l’était la religion et questionne directement notre rapport au pouvoir.

De manière générale, quel message voulez-vous faire passer à travers vos paroles et votre musique ?
Sinaï :
On cherche à transmettre notre intérêt pour la musique et pour l’histoire. On prend du recul et cherchons à illustrer des événements qui ont conditionné, influencé et organisé l’être humain, sans prendre parti. Pour ma part c’est la volonté de faire de beaux morceaux qui prend le dessus, mais les thématiques ne me laissent pas indifférent.
Aharon : Le point central c’est l’humanité qui s’exprime dans la plus grande adversité et sa recherche insatiable d’absolus. Pour le dire autrement, notre fil directeur c’est le fait de montrer l’homme dans ses passions les plus folles, notamment celle qui touche au plus près à la mort pour un idéal. J’ai une profonde fascination pour cet invariant dans l’histoire humaine. Cette émotion qui nous lie tous à travers le temps et l’espace, qui nous font toucher la splendeur de notre condition, quand bien même celles-ci s'expriment par ce qu’il y a de plus détestable dans ce monde.


En parlant de musique justement, « De Republica » est un album fidèle au black metal de GRIFFON, avec un côté peut-être plus théâtral que les précédents, ce qui lui confère une consistance toute particulière. Y’a-t-il eu un travail d’orchestration spécifique, une mise en scène du son GRIFFON lors de l’écriture de l’album ?
Sinaï :
Comme pour l’album précédent, les orchestrations ont été réalisées en fin de composition. Après la basse, les guitares et la batterie, mais avant les chants. Ce n’est pas vraiment une mise en scène, mais un choix de composition. J’aime utiliser, sans en abuser des orchestrations pour appuyer les émotions, enrichir harmoniquement ou même créer des ambiances. C’est à mon avis le détail de fin de composition qui permet d’enrichir l’ensemble des morceaux et de donner une identité caractéristique.

À la fois brutal et épique, votre black metal fait finalement une parfaite bande-son pour l’histoire de France non ?
Sinaï :
La musique n’a pas été composée spécialement pour faire une bande-son pour l’histoire de France. Elle a été réalisée dans une ligne directrice que j’ai décidée. Une ambiance plus dramatique et plus "lourde". Elle reste épique, mais moins que l’album précédent. C’est ensuite Aharon qui a écrit les paroles et adapté son écriture aux compositions. Mais des samples d’ambiance ont été rajoutés pour permettre une meilleure immersion dans les thèmes abordés.
Aharon : Oui... disons que la question de notre histoire nous touche fatalement et c’est ce pourquoi on a tendance à la mettre sans doute plus en avant. Mais disons que je m’approprie tout autant les thématiques abordées par le groupe, qui dépasse largement le cadre restrictif du roman national. Sur cette thématique d’album, c’est parce que les Français ont été porteurs de changements pour le monde que nos chansons s’arrêtent sur les thèmes de la France. Mais nous n’avons aucune volonté d’exprimer une quelconque histoire de France, ce qui n’aurait pas de sens pour nous.

Vous avez sorti un premier single, qui est également la première chanson de l’album "L’Homme du Tarn" qui traite de l’emblématique Jean Jaurès. Qu’est-ce qui vous inspire chez se personnage ?
Aharon :
Simple. Le fait d’aller à l’encontre de tous, contre l’avis général et même contre son propre camp, pour suivre son idéal d’humanité, et ce jusqu’à en mourir. Pour qu’au final, tous reconnaissent qu’il était dans le vrai. C’est par essence un martyr pour l’humanité, dans le sens le plus chrétien qu’il soit, ce qui est plutôt paradoxal vu le bonhomme.
Sinaï : Avant l’écriture du morceau, il m’inspirait seulement en tant que politicien historique valeureux qui a été bénéfique pour la France et... un arrêt de la ligne 2. Mais après avoir lu les paroles, je me suis renseigné, je vois en lui quelqu’un de bien plus grand. Et je le remercie pour les combats qu’il a menés. Qui ont été, je crois, bénéfiques pour notre pays et plus encore.


Comme on le disait, c’est le premier titre de l’album et également le premier extrait. On peut donc penser qu'il est des plus importants à vos yeux. Est-il représentatif de l’état d’esprit de tout l’album ou simplement une bonne entrée en matière ?
Sinaï :
Je crois qu’il n’est pas le plus représentatif du thème de l’album, mais c’est le morceau le plus réussi, que ce soit en termes de composition ou des paroles. Il permet une bonne entrée dynamique dans l’album.
Aharon : Pour le coup, pas vraiment. C’est une thématique importante pour le groupe, mais il reste au final relativement à part dans le reste des thémes du disque. J’aime beaucoup ce morceau.

Quelque chose de marquant chez GRIFFON aussi, c’est l’esthétisme de vos pochettes et celle de « De Republica » est particulièrement symbolique, mais également joliment réalisée. Pouvez vous en dire un peu plus sur cette œuvre ?
Sinaï :
Les différents choix d’artworks ont été décidés ensemble, Aharon et moi. Aharon a proposé les principales idées et on a développé ensemble. On remercie Adam Burke pour la peinture. Il avait déjà fait notre précédent album « O Theos, O Basileus », on est vraiment très content du résultat.
Aharon : Toutes nos pochettes découlent d’un choix entre nous deux. Néanmoins, une fois les questions d’ordres symboliques transmises à l’artiste, on fait un point d’honneur à lui laisser toute liberté d’expression. C’est important de ne pas interagir dans le processus artistique pour ne pas le dénaturer. Concernant la pochette on est très content du résultat. On tenait à représenter un lieu emblématique de Paris, lors d’une insurrection "intemporelle". Il n’y a pas 35 lieux plus intangibles que Notre-Dame pour ça. Et la question du tricolore né de la monarchie, des luttes et des révolutions, nous semblait plutôt judicieux pour illustrer les péripéties de notre république.

Il semble que quelques concerts soient prévus pour promouvoir l’album. Les concerts sont-ils des moments que vous attendez ? Comment vous y préparez-vous ?
Sinaï :
Pour l’instant nous prévoyons une date à Nantes et une à Paris. On verra pour la suite.
Aharon : Disons qu'on ne rajeunit pas et qu’on a plus vraiment le moral et le temps à parcourir les routes pour se produire par tout moyen. On étudie toute proposition, mais on doit aussi décliner des offres. On se laisse porter, notre line-up est prêt, on va voir comment ça évolue.

Une dernière question, plus généraliste : que pensez-vous de la scène black metal française, qui a le vent en poupe en ce moment, notamment grâce aux Acteurs de l’Ombre, label qui vous accompagne ? Êtes-vous fiers de faire partie de cette "famille" dont vous êtes un des représentants les plus charismatiques ?
Sinaï :
Je ne sais pas si la scène française a particulièrement le vent en poupe, mais c’est vrai que quand on joue à l’étranger, on est plutôt bien accueilli et ça fait plaisir. Je vois la scène black metal à travers les groupes dans lesquels je joue et je pense que oui la scène se porte plutôt bien de ce point de vue. Je suis beaucoup moins spectateur donc je ne suis pas le mieux placé pour répondre. On est satisfait de notre label avec qui on communique bien et je ne pense pas qu’on soit les représentants les plus charismatiques. Je pense que Léon Harcore (Vaerohn) est le plus charismatique ahah !...
Aharon : Le black metal français aurait le vent en poupe grâce à LADLO... je ne sais pas. Ce qui est certain c’est qu’il n’y a qu'eux actuellement pour produire ce qu’on fait et le black metal français. Disons que là-dessus ils ont un peu repris le flambeau d’Adipocere. À l’heure actuelle, je ne vois pas GRIFFON sur un autre label. C’est relativement cohérent d’être chez eux vu leur roster actuel et ce que nous attendons d’un label. Disons aussi que les autres labels de black metal en France, que ce soit Debemur, Norma Evangelium Diaboli ou même Osmose, ne choisissent pas vraiment leur groupe sur un critère géographique, leur catalogue de groupe est donc bien évidemment très différent de ce que propose Les Acteurs de l'Ombre. Ça me semblerait étrange de produire GRIFFON autre part en France.

Merci pour cet entretien et on vous souhaite le meilleur pour ce majestueux nouvel album qu'est « De Republica ».
Sinai :
Merci d’avoir pris le temps pour nos réponses qui font un peu gonfler nos égos ahah !... Plus sérieusement, merci de vous êtes intéressé à notre musique et à nos textes. J’espère que cela a éveillé votre curiosité que ce soit en histoire, en musique ou autre... N'hésitez pas à vous intéresser aux gens qui ont collaboré avec nous et qui ont permis l’aboutissement de cet album. À bientôt !
Aharon : Ouais, pareil. Et n'hésitez pas à venir nous parler lors des concerts ou autre, même si on n’a pas toujours l’air très avenant. C’est le seul truc qui nous motive pour nous bouger à faire des concerts.

Blogger : Aude Paquot
Au sujet de l'auteur
Aude Paquot
Aude Paquot est une fervente adepte du metal depuis le début des années 90, lorsqu'elle était encore... très jeune. Tout a commencé avec BON JOVI, SKID ROW, PEARL JAM ou encore DEF LEPPARD, groupes largement plébiscités par ses amis de l'époque. La découverte s'est rapidement faite passion et ses goûts se sont diversifiés grâce à la presse écrite et déjà HARD FORCE, magazine auquel elle s'abonne afin de ne manquer aucune nouvelle fraîche. SLAYER, METALLICA, GUNS 'N' ROSES, SEPULTURA deviendront alors sa bande son quotidienne, à demeure dans le walkman et imprimés sur le sac d'école. Les concerts s'enchaînent puis les festivals, ses goûts évoluent et c'est sur le metal plus extrême, que se porte son dévolu vers les années 2000 pendant lesquelles elle décide de publier son propre fanzine devenu ensuite The Summoning Webzine. Intégrée à l'équipe d'HARD FORCE en 2017, elle continue donc de soutenir avec plaisir, force et fierté la scène metal en tout genre.
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